Le nouveau projet de documentaire de Vincent Pouplard, Nobody Wants to be a Fireman, produit par Emmanuelle Jacq (À Perte de Vue – France) et Jeremiah Cullinane (Planet Korda Pictures – République d’Irlande), est sélectionné au Pitching du Réel 2020. Retour sur les premières étapes du projet avec Emmanuelle Jacq.
Quel est le sujet de Nobody Wants to be a Fireman ?
Voici le résumé ! Dans le sud de Belfast, les habitants du quartier de Sandy Row forment une communauté soudée et veillent à transmettre les valeurs et l’Histoire aux plus jeunes. Chaque année au mois de juillet, les adultes organisent les spectaculaires commémorations loyalistes ; l’espace de jeu habituel des enfants qu’est la rue est soudainement traversé par un souffle identitaire.
Qu’ils épousent cette tradition sans recul ou qu’ils peinent à l’appréhender, les enfants de Sandy Row, Brandon, Carrie, Tori, Rio, Holy et les autres arpentent jour et nuit le chantier de construction du bonfire appelé à être enflammé la nuit du 11 juillet. Ils ne rateraient ça pour rien au monde.
Quel a été le parcours de production du film, jusqu’à présent ?
Le projet a d’abord reçu le soutien de la Région Pays de la Loire, puis celui de la Région Bretagne, avec lesquels nous avons organisé une première session de repérages dès l’été 2018. Si Vincent connaissait déjà bien la ville de Belfast et ses problématiques, il était important qu’il réactualise ce qu’il y avait appris pour être au plus proche des problématiques actuelles et identifier ses personnages. Cette première session de repérages a permis de créer des liens forts avec des habitants du quartier de Sandy Row, en particulier avec les enfants et les adolescents. Le film a dès lors pris un axe différent : Vincent s’est concentré sur la transmission de l’histoire de Belfast et de l’Irlande entre les adultes et les jeunes. Ce premier séjour l’a également conforté dans l’idée de faire un film au long cours, s’étalant sur plusieurs années, pour s’intéresser à l’évolution de ses personnages et pas seulement à l’actualité brûlante du Brexit.
En parallèle de ces repérages, j’ai été sélectionnée à Eurodoc en 2018 avec ce projet. Le regard des professionnels de la coproduction européenne a été stimulant et très riche pour faire avancer l’écriture du dossier. Cela a aussi été un moyen d’accéder à un réseau au sein duquel j’ai pu faire identifier le projet.
A l’aune de ces repérages et du programme Eurodoc, Vincent a retravaillé l’écriture du dossier pour arriver à une version plus incarnée que la précédente. Cette nouvelle version, au parti-pris plus affirmé, nous a permis de solliciter avec succès le fonds d’aide à l’innovation du CNC pour les étapes de l’écriture et du développement. En parallèle, nous avons également sollicité une aide au développement auprès de la Procirep-Angoa pour un programme de trois documentaires, dont Traumascape, premier titre du film.
Grâce à l’ensemble de ces fonds, une deuxième session de repérages a été organisée en juillet 2019. Vincent a pu y consolider les liens avec les personnages, et le projet s’est encore plus clairement orienté vers la jeunesse de Belfast et sur la manière dont elle regarde l’avenir, chargée de sa mémoire collective. C’est à ce moment-là que le projet a changé de titre, et est devenu Nobody Wants to be a Fireman. Un premier montage de rushes de 5 min est issu de ces repérages.
Le projet a ensuite été sélectionné aux Speed Meetings de Docs Barcelona en mai 2019 où nous avons fait des rencontres intéressantes avec des responsables de chaînes, des distributeurs et des agents de ventes internationales. Ces temps de rencontres sont aussi l’occasion de maintenir le lien avec certains décideurs, dont certains suivent le projet avec intérêt depuis 2018. Pour la suite, nous envisageons de soumettre le projet à l’Avance sur recette du CNC. Entre autres dans ce but, les fonds du développement nous ont aussi permis de faire appel à un script doctor qui apporte à ce projet l’expertise nécessaire pour solliciter un soutien au long métrage documentaire cinéma.
Et donc en mars, le projet a été sélectionné au Pitching du Réel à Nyon !
Oui, cette sélection est une nouvelle étape très importante. Avec le Rough cut Lab et les Docs in progress, le Pitching du réel constitue la partie industrie du Festival Visions du Réel. À l’image du Festival, ce forum de coproduction internationale se veut défricheur de nouveaux regards et nouveaux talents. Pour les pitchs, 15 projets sont sélectionnés par an. L’objectif premier étant de confronter les projets au regards des experts présents (responsables de chaînes, distributeurs, vendeurs internationaux, responsables de festivals, institutions). Le format de Visions du Réel permet des échanges rapprochés avec ces experts. C’est aussi un label, qui donne une visibilité plus large au projet. A la clé, il y a également des prix en collaboration avec d’autres partenaires du cinéma ou de l’audiovisuel.
Cette édition sera malheureusement très particulière au regard des circonstances sanitaires, mais elle aura bien lieu dans une version en ligne. Normalement, cela commence par un pitch de 7 min devant tous les experts du panel, chaque binôme réal-prod est ensuite convié pour une discussion d’un quart d’heure autour de plusieurs tables en comité plus réduit de 5 à 8 professionnels / experts. C’est le temps d’un échange, pendant lequel les professionnels font des retours sur les projets et les mettent en perspectives sur le marché actuel. Si l’un des experts est intéressé, des one-to-one sont ensuite organisés.
L’équipe du Festival a fait un énorme travail pour imaginer une version en ligne du forum (et du festival). Pour l’industrie, la version en ligne qu’ils proposent est assez proche du format habituel. Pour éviter les désagréments techniques, il nous est demandé cette année d’envoyer au préalable une vidéo notre pitch (7 min dont le teaser). Ces vidéos seront présentées lors d’une vidéoconférence en présence de tout le monde (experts et participants divisé en 3 groupes), puis des mini-tables virtuelles seront constituée pour faire les round-table. Et les one-to-one seront organisés en fonction des demandes. Visions du Réel est réputé pour être un festival à taille humaine et les rencontres s’y font tout autant dans le cadre formel des pitchs, que lors de moments plus informels après les projections autour d’un verre. Cette dimension moins officielle manquera certainement à cette édition !
Pour aller plus loin, lire l’entretien réalisé par le journal Le Temps avec Émilie Bujès, directrice artistique de Visions du Réel.