Le très beau premier long métrage de Julia Kowalski vient tout juste de sortir sur les écrans français. Présenté à Cannes en 2015 dans la sélection ACID, auréolé du Prix des lycéens au dernier festival Premiers Plans et encensé par la critique, le film signe l’acte de naissance d’une jeune cinéaste à découvrir et à suivre.
Bref retour sur son parcours. Originaire des Sables d’Olonne, et après des études au lycée Guist’hau (Nantes) en option cinéma, Julia Kowalski intègre le BTS audiovisuel de Montaigu en section image. Inscrite en Licence de cinéma, elle travaille à Paris sur des plateaux de TV où elle s’ennuie profondément. Elle décide alors avec Maël Mainguy, rencontré pendant les années Montaigu, de fonder Cut Up production. La société fusionne avec Les films du Balibari qui produira ses premiers documentaires. Julia décide alors de se consacrer au développement de ses propres projets. En 2012, elle réalise le court Musique de chambre, matrice de Crache cœur, qui lui vaut le Prix TV5 Monde et le Prix spécial du Jury Presse au festival Paris Courts Devant.
Nous avons demandé à Julia de nous livrer quelques impressions ou souvenirs relatifs à l’aventure de Crache cœur :
Genèse
« Au départ, il y avait trois histoires, séparées par des chapitres: en plus de celle de Rose, il y avait celle de Jozef et celle de Roman que l’on suivait dans leurs vies à l’extérieur de la maison. Mais j’ai vite compris qu’il fallait aller à l’essentiel, épurer. C’est un premier film et je souhaitais concentrer l’histoire sur le personnage de Rose, qui est le plus proche de moi. Le film est donc en partie inspiré d’éléments de ma vie personnelle, il puise son matériau dans tout de ce que j’ai pu vivre ou qui me constitue. Mais il serait naïf de penser qu’il est autobiographique. Il faut juste se mouiller un peu, sinon ce n’est pas drôle ! »
Écriture
« Avec ce projet, j’ai eu la chance de cumuler toutes les résidences d’écriture et prix et bourses existantes. Pour n’en citer que les meilleurs souvenirs:
– le Moulin d’Andé, en Normandie, où j’ai rencontré mes « frères de cinéma » (par exemple, Naël Marandin qui vient de faire La marcheuse, que l’on peut encore voir en salles), mais aussi ma productrice, Mina Driouche et sa société Les Films de Françoise (fondée avec Valérie Donzelli et Jérémie Elkaïm) qui est devenue ma grande alliée ;
– l’atelier Grand Nord au Québec pour son cadre de rêve, où nous étions logés dans un château en bois d’érable sur le bord de la rivière des Outawais et où j’ai appris à faire du ski de fond entre les séances de brainstorming ! »
Casting
« J’ai mis un an à trouver Liv Henneguier qui incarnera le personnage de Rose. Après avoir rencontré une centaine de filles, toutes brillantes, douées, jolies (sans doute trop jolies…), j’ai flashé sur cette jeune fille qui est arrivée en mini short et en tongs, avec une coupe hirsute et une chemise de bûcheron pas du tout seyante pour un casting. Ma première impression a été que Liv avait du caractère ! »
Tournage
« Le tournage était très dense. Nous avions 25 jours de tournage en tout (20 en Bretagne et 5 en Pologne) ! Comme je prépare comme une malade, on n’a pas à chercher sur le plateau. Rien n’est laissé au hasard, je connais mes plans avant même de trouver les décors, jusqu’au choix de la focale… Par contre, on dépasse toujours. Notamment avec mon chef opérateur, Simon Beaufils, qui me connaît par cœur et qui sait me proposer des plans qui vont parfois au-delà de mes attentes. Même chose avec les comédiens: ils sont très préparés, mais j’essaie toujours de briser la routine de tournage en inventant des « accidents » de jeu qui les pousseront à retrouver une certaine fraicheur pendant les prises. »
Première projection
« La toute première projection a eu lieu à Cannes, dans la sélection de l’ACID. C’était la pire de ma vie ! Nous avons tourné en décembre-janvier (2014-2015) et on a appris que nous étions sélectionné à Cannes en avril. On était alors encore en fin de montage image. Le mois suivant a été une course infernale pour finir dans les temps pour fin mai. Après avoir vérifié le DCP la veille de la projection Cannoise, il y avait plein de détails qui ne me convenaient pas. Bien sûr, j’étais la seule à les voir et le film a reçu un très bon accueil, mais je suis revenue par la suite au labo et en mix pour modifier un certain nombre de choses. Depuis, malgré des configurations de salles très différentes (1300 personnes à Premiers Plans à Angers ou 8 personnes à Saint-Michel-sur-Orge), j’ai toujours besoin de vérifier la copie avant la projection. Mais je suis toujours autant ravie de constater que tout va bien ! Et surtout, après environ 80 projections (entre les festivals dans le monde entier et les projos organisées par l’ACID), je suis devenue une vraie bête de débat ! »
Bande-annonce de Crache cœur : http://www.allocine.fr/video/player_gen_cmedia=19560409&cfilm=237294.html